Un jeune sur quatre est en situation de pauvreté et le monde étudiant n’y échappe pas. Quels constats ? Et surtout, quelles actions ?
« Aucun jeune ne doit renoncer à étudier »
« L’ambition est c lai re : au cu n jeune ne doi t renoncer à son projet d’étude pour des raisons de précarité », martèle Florence Vanderstichelen, directrice du Service d’aide aux étudiants de l’UCLouvain. La politique de vie étudiante globale de l’université touche tous les aspects : logement, restaurants, sport, aide psychosociale, santé, aide sociale et financière. Les publics les plus précaires sont les familles monoparentales, les étudiants internationaux hors Union européenne sur fonds propres mais aussi des étudiants jobistes arrivés pendant le covid qui ont ensuite disparu des radars.
De multiples aides
Différents mécanismes d’aide sont actionnés. L’allocation d’é³Ù³Ü»å±ð²õ de la Fédération Wallonie-Bruxelles concerne plus de 4 000 étudiantes et étudiants. Pour ceux qui n’y ont pas droit, l’UCLouvain vient en renfort. Près de 2 000 étudiant ·es demandent une aideÌýfinancière en complément ou à la place de l’allocation d’é³Ù³Ü»å±ð²õ et 75 % d’entre eux sont dans les conditions pour l’obtenir. Cela va de quelques centaines à 6 000 € annuels.
En outre, entre 500 et 600 étudiant·es obtiennent un soutien financier pour le logement, le plus souvent avec priorité pour l’un des 5 000 logements de l’UCLouvain, moins couteux que dans le privé. Plusieurs centaines d’ordinateurs sont, soit mis à disposition gratuitement, soit co-financés jusqu’à 450 € dans le cadre de la lutte contre la fracture numérique. À cela s’ajoutent parfois une priorité pour avoir un job, deux épiceries solidaires (250 participants annuels) et une halte-garderie pour les enfants des étudiant·es. Douze assistant ·es sociaux soutiennent les bénéficiaires au sein du Service d’aide aux étudiants auquel contribuent plus de cinquante professionnel·les.
Catherine Ernens
Journaliste
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Collaborer dans l'intérêt du jeune
« Les CPAS s’occupent de plus en plus souvent d’étudiantes et d’étudiants », explique Stéphanie Degembe, conseillère à la fédération des CPAS. « Cela va notamment de pair avec le fait que les étudiant·es ont plus facilement accès aux é³Ù³Ü»å±ð²õ, y compris dans les familles précarisées. » Au 1er janvier 2022, 24 087 jeunes de moins de 25 ans bénéficiaient d’un revenu d’intégration en Wallonie. Soit 34,2 % du nombre de bénéficiaires du revenu d’intégration, alors que les 18-24 ans ne représentent que 14 % de la population active. Les étudiant ·es bénéficient de laÌýmême prise en charge qu’une autre personne avec, cependant, une particularité : pour éviter l’engorgement des CPAS des grandes villes universitaires, c’est celui de la commune du domicile et non de résidence qui prend en charge le jeune.
Une meilleure collaboration
« Les CPAS sont très impliqués pour accompagner ces étudiant·es afin qu’ils obtiennent un diplôme qui leur permettra de quitter le système d’aide sociale », souligne la conseillère. « Pour y arriver, les différents acteurs doivent mieux travailler ensemble dans l’intérêt du jeune pourÌýÌýqu’il reçoive les aides auxquelles il a droit et éviter que les services ne se renvoient la balle. » C’est le sens de la commission CoVEDAS au sein de l’ARES* qui renforce la collaboration avec la Fédération des CPAS. Une fiche d’information et de liaison est aussi à l’étude : remise à l’étudiant, elle permettrait aux services sociaux des universités, aux hautes écoles et aux CPAS de collaborer. « Il ne s’agit pas de traquer des doublons mais bien de se rendre complémentaires tout en préservant le secret professionnel. » C.E.
* ARES : Académie de Recherche et d'Enseignement supérieur
« Agir avant le décrochage »
La pauvreté a changé de visage. Ce n’est plus celui d’une personne âgée mais bien d’un jeune puisqu’un sur quatre est aujourd’hui en situation de pauvreté. C’est l’un des constats majeurs de la vaste étude menée par Itinira Institute, ‘Agir durablement contre la pauvreté’.
La pauvreté des étudiants est un problème particulier. « On a une pénurie de kots et beaucoup d’insalubrité alors que le cout du logement représente en général la moitié d’un revenu d’intégration », souligne Jean Hindriks, professeur à l’UCLouvain et l’un des auteurs de l’étude. « À cela s’ajoute aujourd’hui les facturesÌýd’énergie. Les étudiants baissent le thermostat de manière radicale. Or, avec la crise du pouvoir d’achat et énergétique, le soutien parental s’effrite pour certains étudiant·es. Les jeunes font des jobs qu’il est parfois difficile de combiner avec la participation aux cours. L’insécurité des fins de mois génère une anxiété qui ne favorise pas la concentration dans les é³Ù³Ü»å±ð²õ. Les étudiants précaires sont ceux qui sont le plus soumis à l’échec et à l’abandon. L’ascenseur social ne fonctionne plus vraiment », insiste l‘économiste.
Agir au plus vite
La précarité touche aussi la santé et la santé mentale en particulier. « Les dépressionsÌýÌýsont fréquentes chez nos étudiants. Des addictions, notamment à l’alcool, s’installent et ne sont pas traitées. Il faudrait mener une enquête pour comprendre pourquoi des étudiants ne viennent plus aux cours et détecter plus rapidement les cas de décrochage et d’isolement. » Que faire ? « Accompagner davantage ces jeunes, aller les voir dans leur kot. Il faut agir fort et vite avant que le décrochage ne s’installe et coordonner les différents services d’aide en offrant un guichet unique. » C.E.
> ‘Agir durablement contre la pauvreté’, de Jean Hindriks et Joël Van Cauter :
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